Flora au Ventoux Avril 2022

Publié le 29 avril 2022 dans Les récits

Une pirate au Luberon…

«Le programme m’a séduit. Un total de 360 km et de 6148 de D +, avec l’ascension mythique du Mont Ventoux. Comme je ne connais pas bien ma géographie, à aucun moment je me suis dit que ça faisait loin quand même, d’y aller pour un week end. La crédulité a certains avantages.

Après dix heures de route, j’arrive dans un endroit magnifique. L’auberge des Seguins, nichée au creux d’une vallée rocheuse. Bien que la moral de cette histoire (la chèvre de Monsieur Seguin) est qu’on ne doit pas se lancer la tête la première dans un milieu inconnu, je décide d’y lancer mes pieds d’abord, puis mes roues.

Le lendemain, je rejoins un groupe de 11 personnes. 4 ce sont déjà excusés au vu des conditions météo. La veille j’avais pu gouter lors de ma randonnée au déferlement aqueux et au ciel qui gronde. Je m’accroche à un jeu offert par mon fils qui représente un arc en ciel, tel un talisman. Après la pluie vient le soleil…Il n’en fut rien. J’utilise alors la force du Mantra (le talisman ne fonctionnant pas) en me répétant « lâches prises et acceptes ». Direction donc le Mont Ventoux, par Bédouin.

Après 20 km d’échauffement, nous nous retrouvons au km 0 de l’ascension. C’est partie… Un virage et là nous y sommes. Pente de 9% de moyenne sur 11 km. J’ai essayé de trouver mon rythme qui m’a paru très vite en surrégime. Les petites bornes blanches indiquant le nombre de km restant et l’altitude, défilent lentement, très lentement… Je me sens plutôt seule lors de cette ascension. Mais la solitude de la tâche, la rend encore plus sacrée.

Je lutte… J’ai mal au dos…. Je lutte…j’ai soif…. Je lutte… ils descendent déjà ceux-là… Je lutte… putain c’est long…. Je lutte…. Es que j’ai bien éteint toutes mes lumières… Je lutte… mais t’as quoi à prouver pour t’infliger ça…Je lutte…Si je décroche maintenant je n’arriverai jamais à remonter sur mon vélo…Oh des petits cœurs sur la route…Finalement « j’accepte et je lâche prise ».

Je sors de la partie arborée. Il reste 6 km à découvert. Je suis bien décidée à me taper ce grand chauve. Le panorama empêche mon mental de s’agiter. Je me plonge dans cette vue culminante.

Un marquage au sol indique « attaque ». Pour la forme je me mets en danseuse sur deux mètres mais il reste surement plus de deux km. La tête tourne. Surement l’altitude. 1912 mètres, me voilà au sommet (1°c), portant fièrement les couleurs de mon club… Une fois l’effort terminé, je me refroidi vite. Je me couvre et en avant la descente. Les dents claques et les muscles sont contractés par le froid. Une fois en bas je peux profiter timidement du soleil qui s’éclipsera ensuite pour le reste du stage.

Les jours suivant nous composerons avec les conditions météo. Merci à mère nature de me préserver d’un cancer de la peau et tant pis pour mon bronzage cycliste. J’aurai eu le plaisir de re-découvrir les joies enfantines et régressives des couches humides, grâce à mon cuissard.

Un grand merci pour toutes ces belles rencontres, ces histoires de vie…

Cette parenthèse enchantée est toujours empreinte de sincérité et d’authenticité… L’effort et la grisaille abattent les derniers remparts qui constituent les rencontres véritables, authentiques et sincères.

Pour conclure, je citerais l’un des hommes rencontré lors de mon trajet retour sur une air d’autoroute. Un homme âgé, sortie tout droit d’un livre de Marcel Pagnol, et dont l’accent était ponctué de cigale, m’a dit « Hé Putaing, ça fait mal au cul »

Acceptes, lâches prises… Merci la vie »

Flora la Biche…

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