Strade Bianche 2023 par Johan

Publié le 25 mars 2023 dans Les récits

Dimanche 3 mars 2023… un chien aboie au loin…mes yeux s’ouvrent spontanément… le réveil sonne :
il est 6h00.
La nuit fut très bonne et les huit heures de sommeil au rendez-vous de cette journée mémorable.
J’entends mes deux compères s’afférer dans leur chambre et la salle de bain. Le bal de la douche et
des toilettes cadence le début de cette matinée.
Les rideaux ouverts, je perçois déjà les nombreuses villas dans la campagne dont les lumières viennent
dessiner le relief de ce paysage de Sienne.
Les vêtements déjà ordonnés de la veille, prennent place sur l’athlète de la journée. Ce qualificatif
commence à s’ébranler lorsque dans ma tête se refait le schéma de la préparation hivernal :
Ai-je fait ce qu’il fallait ?…
Ai-je assez de kilomètres parcourus ?…
Ai-je assez fait de dénivelé ? …de fractionné ?…
Vous voyez ?! Toutes ces questions d’avant course, d’avant défi, d’avant l’objectif ! Toutes ces
questions qui vous traversent aussi vite l’esprit qu’elles y disparaissent car aujourd’hui, car ce matin,
quoi qu’il arrive, les dés sont jetés et l’objectif prioritaire de cette virée reste le même depuis que
l’aventure des Cinq Monuments a commencé : « Prendre du plaisir ! ».
Ah oui, Strade Bianche est-il ou non le 6ème Monument ?
Voilà le débat qui se discute depuis une semaine sur les ondes de radio. Pour ma part le débat était
tranché depuis un petit moment : « Les Strade » est une course mythique depuis 2007, année de sa
création.
Ses quatre derniers vainqueurs ayant fait rentrer pour moi cette course dans la Légende.
Ils se nomment : Tadej POGASCAR, Mathieu VAN DER POELS, Wout VAN ART et Julian ALAPHILIPPE :
What else !
Le soleil est au rendez-vous ce matin et ses premiers faisceaux éclairent déjà ces chemins blancs
typiques de Toscane bordés de leur pins parasols et de cyprès.

7h15 vient de carillonner à la petite Église du village où notre villa typique de briques roses adopte son
manteau de Quartier Général pour cette édition 2023.
Notre pied à terre se situe à sept kilomètres du départ et les petites bosses à 8% donnent à ce relief
un échauffement digne de ce nom car il annonce un dénivelé de 150 mètres pour cette petite portion
qui nous permettra de rejoindre le sas de départ sur le parking où la veille, les équipes professionnelles
avaient établi leur camp de base.

La cloche de départ retentie à 8h00 et nos hôtes du jour ne sont pas des moindres car Fabian
CANCELLARA, Mario CIPOLLINI, Paolo BETTINI et Sonny COLBRELLI nous ont fait la surprise et
l’immense joie d’être présents pour cette promotion 2023.
Ça y est, nous allons enfin pouvoir en découdre avec ce circuit que nous avons pu admirer lors des
courses féminines et masculines qui ont vu la veille Demi VOLLERING et Tom PIDCOCK s’imposer chez
les professionnels.
Le départ typique d’une cyclosportive nous fait avaler les premiers dénivelés sur route à vive allure et
les 45 premières minutes nous font dire, à moi et mes compères, qu’il ne faut pas que nous oubliions
les 2300 mètres de dénivelé annoncés pour cette classique italienne.
Après s’être résolus de jouer la gagne « lol » nous attaquons la première portion des chemins blancs
par une longue ascension de 5,8 kms dont les trois derniers sont à environ 8-10% de moyenne. L’art
suprême de ce secteur se jouera dans le fait de bien placer sa roue sur les parties roulantes de ce
chemin en se jouant du trafic, des pierres et des crevasses.
Je me sens bien, les jambes sont légères, le plaisir est bel et bien là, et mon sourire me trahit lorsque
je double et me faufile entre les combattants du jour.
Les Strade Bianche sont lancés et je ne remarquai même pas que j’avais, durant cette première
difficulté, doublé mes deux camarades, ce qui me valut un bon coup de pédale pour tenter de les
récupérer, les croyant devant moi… il me fallut attendre le quatre-vingtième kilomètre pour me rendre
compte qu’ils ne tentaient pas de me semer !!!!
Les paysages sont tout simplement magnifiques… les villas jonchées sur les collines… les allées bordées
de pins s’apprêtent par moment à nous livrer une légion Romaine, voire Russel Crow venant retrouver
les traces de sa famille dans le film légendaire « Gladiator ».
Le décor est vraiment cinématographique par moment dans cette région antique et qui vu la veille une
victoire épique d’un britannique.
Laissons là les artistes locaux, tels que Apollinaire ou Michel-Ange, jouer avec les rimes et les mots
pendant que moi je m’afférais à jouer avec mes dérailleurs pour ne pas tomber dans d’autres maux.
Le sourire ne me quitta pas non plus lorsque sur les crêtes, à l’ombres des pins sur ces blancs chemins,
je pouvais jouir du paysages des collines de part et d’autre du parcours, mais que dire de la longue
ascension au kilomètre soixante-dix qui nous emmena au bout de neuf kilomètres et demi de chemin
sur une vue panoramique à couper le souffle !!!! La carte postale de la Toscane était là !
Nous entamerons à partir de là, une partie descendante qui vit Betiole chuter lourdement la veille,
puis une partie de faux plat montants, vent de trois-quarts face, qui fut la partie la moins plaisante du
parcours, mais il faut dire que la barre était déjà haute quelques kilomètres auparavant.
Dernier ravitaillement du parcours, il reste 25 kms à faire, le moral est toujours au top et les jambes
sont encore assez fraîches.
En regardant mon compteur, je m’aperçois qu’il reste encore 600 mètres de dénivelé à réaliser sur ce
dernier tronçon !!!
Effectivement, le départ du ravitaillement est rythmé par une bosse avec des pentes à 18% et il me
faut rester vigilant en slalomant entre les participants qui marchent ou bien d’autres qui vacillent à la
limite de la chute et pour d’autres à la limite de repartir dans le sens inverse.
L’enchaînement des dernières bosses commence à faire siffler mes quadriceps déjà bien affûtés par
les nombreuses collines déjà franchies et la dernière portion de chemin, appelée « Le Tolfe », finira par
m’arracher un râle lorsque j’eu franchi son sommet et vu mon compteur afficher 19%.

Il resta 10 kms à parcourir lorsque je vis la civilisation revenir à moi et me rappeler de rester vigilant
sur quelques enchaînements de « pif paf » et des courbes en descente où mes pédales venaient
fleurter avec les cimes en granit des trottoirs.
La flamme rouge, la flamme de la délivrance, la flamme avertissant le dernier kilomètre, la flamme
rouge annonçant pour les professionnels de la petite reine la bataille ultime pour la victoire, la flamme
rouge qui voit les watts fleurter avec des valeurs que nous autres, pauvres amateurs, ne voyons
s’afficher que brièvement pendant quelques secondes d’efforts violents.
Ici la flamme rouge m’annonçait mon dernier combat avec les pentes Siennoises et ce duel ne fut pas
des moindres car « Via Santa Caterina » m’attendait pour m’ouvrir ses bras sur la « Piazza del Campo ».
San Caterina ne dévoile pas facilement ce « laisser passer » vers la « Piazza del Campo » car il me fallut
m’accrocher pour franchir ses 500 mètres de montée à 12.5% de moyenne, mais surtout les 17% situés
sur les dix derniers mètres avant de basculer sur la droite.
La foule était encore amassée sur les bas-côtés de cette ultime ascension, les cris, les
applaudissements, les encouragements multi linguistiques furent mon carburant pour venir à bout de
ce formidable parcours et le passage des ruelles ombragées vers la « Piazza del Campo » qui elle,
baignait dans le soleil, fut vraiment l’apothéose d’un spectacle magnifique.
La médaille autour du coup fût ma récompense pour le plaisir que j’ai pu prendre pendant toute cette
journée et cette médaille me rappela symboliquement l’objectif que je me suis fixé :
« Me donner les moyens de vivre mes rêves et de ne pas rêver ma vie ».
Au revoir Sienne et tes chemins blancs…et à bientôt Milan, direction San Remo !
Johan – 05/03/2023

Pour les amoureux des chiffres :

  • Développement 52×36 et 11×36 (11 vitesses)
  • Pneus Continental 4 Saisons en section de 32
  • Pression 6 bars
  • Temps 5h24 (25.5 de moyenne…sachant que j’étais à 27.5 à 25kms de la fin !)
  • 137.5 kms
  • 2300 m de D+
  • 1° à 8h00 puis 12° à 12h00
  • Pas de bonnet, tricot technique d’été, maillot mi-saison, coupe-vent, cuissard long, couvre chaussure d’été, gants de VTT avec gants fins par-dessus la 1ère heure.

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